Bistrot populaire
Tout d’abord il y a cette petite salle un soir
Mon bistrot populaire
Enfumée sentant la bière
Assis sur des chaises en bois autour des tables
En bois luisant
Des gens qui essaient d’oublier la semaine et la fatigue
et aussi d’autres accoudés au zinc
Parlant parfois fort
Pour faire mieux
Que le jukebox
Diffusant ses petits vinyles 45 tours
Des slows ou du Johnny
Avec même un ou deux couples
Langoureux s’aimant
On le devine ils dansent un peu gauches
Même en oubliant l’autre qui regarde
Et puis il y a la patronne
Derrière son comptoir
À la peine à la pompe
Sourire incandescent
Et petite robe affriolante
Ils boivent ils dansent
Pas que des vieux des jeunes aussi
Cherchant l’âme sœur après la journée dure
Usine garage mine chômedu
Envie que la tête s’envole un peu
Se grise te fait penser
A ce que tu ne seras jamais
Ensuite il y a les lumières un peu jaunes
Une ampoule qui a lâché
Mais c’est pas important
La lumière elle est dedans
Allez le temps passe les couples se multiplient
On est dans une rue un peu falote
Le bistrot éclabousse le trottoir
La patronne augmente le son
Et fait des p’tites mimiques coquines
Ressert
Je suis là dans le fond
Face à ma bière toujours courageuse en mousse
Cette petite salle un soir
C’est comme le paradis tous les jours
J’en crève aujourd’hui
Parce que les baisers volés sur des bouches
Ont laissé des traces amères
Et la musique dans nos oreilles
Des envies de retour au pays
Celui qu’on aime et qu’on oublie
Petite salle du bistrot du coin
Un soir
Vous voulez un peu de cinoche
Ce sera du Gabin du Belmondo du Suzanne Flon
Et vogue la galère
A la fin il y a la petite salle un soir
Non une aube gueule de bois
Si vous me permettez


Tu ne connais pas la femme

Tu ne connais pas cette femme
Venue de l’ombre
Avec ses gestes mesurés
Ses yeux te fixant
Tu ne connais pas cette femme
Dont l’amour affleure
Tout le long de sa peau
Fine et brûlante
Tu ne connais pas la femme cette femme
Toute ta vie au large
Des terres de là-bas
Tu ne connais pas cette femme
Onde douce et marine
Ta solitude incarnée dans des pas
Oubliés des traces
Sur le sable jaunissant
Tu ne connaîtras jamais cette femme
Pourtant fidèle et libre
Comme un fluide du ciel
Comme une évidence qui s’efface
Une éternité dans les recoins
De l’inconnaissable
Tu resteras cet homme
Orphelin
Que des vies multiples
Laisseront à jamais
Un peu naufragé
Largué dans l’envie
Ridicule écueil
Dans les marées de son corps
Tu ne connaîtras jamais la femme

Écris-moi… dans les reflux de la nuit.
GILRAY
Janvier 2020