Mascarade
Les masques s’agrippaient aux visages

Les uns hilarants les autres sombres
Certains laissant quelques gouttes de sang
Se figer sur des joues glabres
Ils apparaissaient sous des réverbères
Au coin des venelles
Délitaient la brume du soir
Burlesque et ouateuse
A peine se mouvaient-ils
Sur des corps invisibles
Masques d’êtres diaphanes
Masques d’humains de la terre
Ils nous peuplaient
Nous arrachaient d’infinies grimaces
Des rictus animaux
Les yeux perçaient au tréfond
D’orbites de carton
La ville enfin révélait son visage
Les séides de la nuit
Un théâtre d’ombres
Et de costumes pailletés
Collant à des peaux marbrées
Masques d’infortune
Masques de pestiférés
Loups d’une blancheur céleste
Et dominos affranchis de leurs maîtres
Toute une meute embrassant la cité
Nous n’étions que de simples marionnettes
Équilibristes chutant de leurs piédestaux
Aux prises avec d’indécis théâtreux
Faisant maigres figures
Et misérables mascarades
Nous fuyions les draperies exsangues
De nos demeures patriciennes
Laissions derrière nous
Les épouvantails figés
Dans de simiesques postures
Ils furent les maîtres absolus
Et nous les victimes consentantes
Ridicules polichinelles
Enclavés dans cette commedia
Que l’oubli a déjà désertée
Vaine multitude

… vaine multitude